Arrivée de nuit

Le Hall était grand et sombre, éclairé par la seule lumière de la lune qui passait à travers les larges fenêtres. Le silence était lourd, comme si la pièce entière avait été en attente d'un évènement important. Mais la seule chose qui fendit ce silence fut un grincement, long et lugubre, qui venait des gands battants de la porte d'entrée, qui s'ouvrirent sur une petite silhouette fine. Naelya entra, referma le porte derrière elle et s'arrêta en plein milieu de la pièce, scrutant les moindres détails pour ne jamais oublier ce moment. Elle regarda les meubles, le sol, les murs, détailla chaque petite fissure du plafond... Puis elle baissa la tête, revenant à la réalité.

*Ben dis donc... C'est vide ici après minuit !*

Elle s'avança un peu, cherchant désespérément un signe de vie quelconque, mais ne trouva même pas une simple mouche venue lui souhaiter la bienvenue. Elle baissa la tête, regardant instinctivement ses pieds, un peu déçue. Elle aurait dû s'en douter, personne ne faisait attention à elle. Il est de ces moments où on a vraiment besoin de réconfort, où tout semble aller mal et ne va jamais s'arranger.

*J'aurais jamais dû venir ici...*

Elle se reprit, réalisant que sa réaction était insensée. Elle était dans un pensionnat après tout, et c'était normal qu'à une heure si tardive personne n'était encore levé. Elle, par contre, venait de loin et n'avait eu que très peu l'occasion de se reposer, et rechignant à passer une nuit de plus dehors elle avait décidé de passer la nuit à marcher. Elle regrettait maintenant ce choix, se demandant si elle n'aurait pas mieux fait de venir pendant la journée, où quelqu'un aurait pu l'accueillir et lui montrer le chemin. Car elle était maintenant exténnuée et n'avat aucune envie de chercher un dortoir pendant des heures.
Elle releva la tête, d'un air résigné, espérant toujours trouver quelqu'un pour la guider.

*Brrr... Je n'aime pas ce silence... On dirait une veillée funèbre.*

-Hého ! Y a quelqu'un ?

*Bon, tant pis...*

Elle abandonna, et se dirigea vers les escaliers qui se trouvaient juste devant elle, en chantonnant pour briser le silence. Rien de bien mélodique, mais un petit "tarada tsoin tsoin" suffisait amplement à briser le lourd silence qui régnait.
Elle était venue sans valise, n'ayant pas eu le temps d'emporter ses rares affaires de chez elle, et tout ce dont elle avait besoin contenait dans ses simples poches.

Comme chaque nuit, Haruna ne dormit pas. De toutes façon elle avait d’autres projets beaucoup plus attrayant que de fermer les yeux dans un lit. La nuit était un moment pourtant tellement magique et intrigant elle ne voyait pas pourquoi les gens ne dormait pas plutôt le jour. Elle avait passer une large partie de la soirée à lire et se promener dans les couloirs, s’imprégnant de cette sombre et exaltante sensation que dégageait l’obscurité. Un calme reposant et agréable émanait des passages déserts du pensionnat.
Elle avançait vivement en réfléchissement à toute sorte de choses. A la routine du lendemain, au repas et au coup de fil de son père la veille. Son père l’avait appelé par politesse pour montrer qu’il ne l’oubliait pas mais sans réelles questions ou informations à lui dire. Parfois il l’informait sur l’endroit où se trouvait sa mère, un âpre sentiment de regret dans la voix. Elle fronça les sourcils, énervée d’être consciente que son père aimé encore sa mère mais pas inversement. Ses yeux se noircirent et sa marche redoubla de vitesse. Elle traversa un long couloir sans aucuns bruits et retrouva sa bonne humeur.
Elle d’arrêta un instant, figée, remettant ses idées dans l’ordre elle chercha où elle était à présent. Une vaste pièce rectangulaire, un sol poli qui reflétait l’apaisante lumière de la Lune : aucun doutes elle se trouvait dans le hall. Elle passa devant un grand miroir d’époque. Son reflet la fit frissonner. Sa peau blanchâtre luisait étrangement, elle leva la main vers sa joue et hésita à la toucher s’attendant presque à la transpercer. Elle était habillée dans une longue et fine robe de nuit grise. Elle plissa les yeux, le reflet s’exécuta instantanément.
Un bruit sourd se fit entendre près de la porte d’entrée, aucun doute quelqu'un arrivait. Elle laissa un petit cri de surprise lui échappait puis s’assis derrière une colonne, déçu de ne plus être seule. Une jeune fille frêle entra, peu sûre d’elle. Elle fixa la pièce s’attendant à voir arriver quelqu'un pour lui souhaiter la bienvenue. Haruna n’ayant qu’une hâte : reprendre la contemplation de son reflet, elle se leva sans bruit et s’approcha de la demoiselle qui s’apprêtait à monter.

-Bonjour, lâcha t-elle plus glaciale qu’elle ne l’aurait voulu.

Naelya regarda la jeune fille qui venait d'arriver, très pâle et à l'air famélique, et resta un moment béate devant ses yeux qui donnaient une impression indescriptible, mais qui mettait Naelya mal à l'aise. Elle tortilla ses cheveux, serra les dents et essaya d'avoir l'air le plus naturel possible. Chose très ardue, surtout pour elle... Et la grimace qu'elle fit devait être plus effrayante qu'autre chose. Naelya s'en doutait, mais elle n'y fit rien. Après tout, pourquoi cacher ses sentiments, et une grimace était ce qui pouvait caractériser le mieux ce qu'elle ressentait à ce moment, mélange de malaise, d'exténument et de soif.

*Tiens, j'ai soif, j'avais pas remarqué...*

Revenant à la réalité, elle tenta de sourire, réalisant que ça devait tout de même ête la meilleure solution si elle ne voulait pas faire trop mauvaise impression dans ce nouvel établissement, et proféra de la voix la plus joyeuse qu'elle pouvait avoir, sans trop y croire :

-Bonjour ! Je suis Naelya, je suis nouvelle...

Elle hésita sur la formule d politesse à adopter, serrer la main, tout simplement se présenter et attendre que l'autre en fasse de même... Elle opta finalement pour la solution la plus facile, qui consiste à imiter la personne qui se trouve en face. Elle se blâmait elle-même pour l'attitude de "faux-cul" qu'elle avait, mais avait inconsciemment une peur bleue qu'on ne l'accepte pas ici, et qu'elle dûsse repartir, de nouveau seule dehors.
Elle joignit les mains derrière son dos, espérant ainsi cacher à la jeune fille qu'elle n'avait pas de bagages, ce qui aurait donné un air miséreux des plus pitoyables. Mais de toute façon, elle s'en serait bien apperçue un jour ou l'autre...

Haruna plongea les yeux dans ceux de l’inconnue mais ne s’avança pas. La jeune fille garda aussi ses distances ce qui plût à Haruna. Le sourire de la nouvelle était réservé, elle parut hésiter un instant la façon de se comporter. Haruna décida de ne pas l’apeurer d’avantage se rappelant très bien son premier jour et se radoucit, un sourire en coin discret. Elle aussi était arrivée seule avec appréhension vers ce nouveau lieu qui allait être pour longtemps sa maison, elle avait envisagé les pires scénarios possibles.

-Bienvenue à Element Students alors, ajouta-t-elle d’une voix faussement enjouée, scrutant toujours l’inconnue d’un long regard placide, amère.

Elle détacha ses yeux de Naelya, s’éloigna, retournant vers le miroir l’air pensive. Elle marchait gracieusement, sans bruit, traversant la pièce tranquillement. Haruna observa presque déçu que le reflet était le même que tout à l’heure. Ses yeux laissaient se mirer l’astre, s’accordant avec sa peau froide. Elle referma ses paupières un instant avant de les rouvrir soudainement. Elle laissa échapper un soupir d’aise en s’asseyant sur le vieux fauteuil rouge et or qui était appuyé contre le mur, à la gauche du miroir. Un vieux siège où rares étaient les élèves qui osaient s’y asseoir, il paraissait si fragile. Mais oublié du temps il continuait sa vie, dans ce pensionnat.

-Quel est ton pouvoir Naelya ? Dit elle enfin dans le calme du crépuscule.

Elle cherchait un détail qui lui permettrait de savoir depuis le début mais hésitant entre l’eau et l’air, elle préféra poser la question. Tout en l’examinant, elle vu que la demoiselle n’avait aucun bagages. Elle n’aborda pas le sujet car la jeune fille fatiguée, sans doute par son voyage, paraissait ennuyée, cachant ses mains dans le dos.

[Hj : j'ai changé d'élément ^^]

Naelya hésita un instant, et finit par suivre Haruna et s'assit sur une chaise, non loin d'elle.

-Mon pouvoir ? euh... Je contrôle la terre.

Cette question la laissait muette, inexplicablement. Elle avait toujours caché son pouvoir, car dans le monde riche où elle vivait auparavant elle était considérée comme un monstre ou une sorte de sorcière, et si sa mère n'avait pas insisté elle aurait été bannie bien plus tôt de chez elle.
Naelya secoua la tête, comme pour chasser tous ces souvenirs de sa tête. Ce n'était plus la peine de s'attarder du passé, il fallait qu'elle vive sur le présent... Ce qu'elle avait toujours eu du mal à faire.

-Et toi ?

Elle leva les yeux, scrutant comme aux premières minutes de son arrivée chaque détail de la pièce. Ses yeux croisèrent un miroir, tout près du fauteuil de Haruna, et elle fut heureuse de ne pas voir son reflet dedans. Elle n'avait eu que rarement l'occasion de voir son reflet depuis quelques mois, mais elle savait que ces durs temps dans la rue lui avaient coûté toute la jeunesse de ses traits, l'éclat de ses yeux, la roseur de ses joues... A la place, elle avait des poches sous les yeux et ses joues étaient creusées par la faim. Tout cela, elle en avait peur. Ce n'était pas elle. Elle n'avait pas eu le temps de s'y habituer, et chaque fois qu'elle se voyait ça lui faisait un choc de devoir s'admettres si mal en point. Mais après tout, elle aurait sûrement le loisir d se refaire dans sa nouvelle école...

Umbrella sourit, un sourire qui ne trahissait ni joie ni tristesse, un sourire neutre. Elle la fixa intensément sans cligner des yeux avant de reprendre la parole.

-Alors je pense que l’on va être amenée à ce revoir souvent, dit-elle cette fois sincèrement contente car moi aussi je contrôle cet élément

Elle se releva très rapidement et fit face à Naelya. Sa main droite était le long de son corps pendant que l’autre jouait avec une meche folle. La lune brillait moins intensément à présent, sans doute un nuage la caché. Elle s’approcha de la fenêtre, traversant à nouveau la pièce avec autant d’aisance. Depuis combien de temps, parlait-elle à la jeune fille ? Elle n’en avait aucune idée. Dehors, rien ne bougeait. Le vent ne soufflait pas, la vie semblait arrêtée. Elle se perdit dans la contemplation de ce ciel étoilé. La voûte céleste était quelques peu nuageuse mais certains endroits laissaient voir les belles étoiles. Lors ce qu’elle était petite, Haruna aimait regarder le ciel et les étoiles quelques part à des millions de kilomètre de la Terre la fascinaient.

-Alors ? Qu’est ce que tu penses du pensionnat ? Correspond-il à tes attendent ?

Haruna s’était retourné vers la jeune fille, le regard brillant. Mais se ravisa, elle se rappela que la jeune fille venait d’arriver et devait vouloir qu’une chose, dormir.

-Je suis désolé de t’embêter avec mes questions, reprit elle calmement. On en reparlera une prochaine fois. Je pense que tu devrais aller te coucher, demain va être une grande journée pour toi.

Elle esquissa un sourire, elle espérait en savoir plus sur cette nouvelle. Elle aussi était, bizarrement fatiguée, et puis le livre qu’elle venait de commencer l’attendait sur son lit.

Naelya fut sincèrement rassurée d'apprendre qu'Haruna contrôlait le même élément qu'elle. Elle avait l'impression de se sentir comme en territoire connu, un peu moins "bizarre" et plus comme les autres. Une vague de chaleur et de fierté la fit rougir, trop heureuse qu'elle était d'être comme les autres. Une sensation qu'elle n'avait pas ressentie depuis bien longtemps, trop longtemps même...
Elle se mit à réfléchir devant la question qu'elle venait de lui poser. Le pensionnat correspondait-il à ses attentes ? Elle ne savait pas vraiment... A vrai dire elle ne savait pas exactement ce à quoi elle attendait en venant ici. C'était un peu sa dernière chance, son dernier espoir de se sentir chez elle quelque part. Et ça, il était trop tôt pour le dire...

-Je ne sais pas vraiment... Tu ne m'embêtes pas du tout, non, mais je pense que je n'ai pas vu assez du pensionnat pour pouvoir le juger.

Elle bâilla, comme quand on voit quelqu'un bâiller et on bâille ensuite, cette fois on lui avait rappelé sa fatigue et elle se fit plus harassante.

-Oui, c'est vrai, je suis plutôt fatiguée...

Elle commença à se diriger vers les escaliers, qui décidément lui inspiraient confiance, puis se ravisa et se retourna, se rappelant les derniers mots de Haruna.

-Une grande journée ? Pourquoi ça ?